Chapitre 10 - Entre Griffes et Murmures

Le lundi matin, l’air frais de Forks n’avait jamais semblé aussi lourd. Paul, malgré sa détermination, n’avait pas pu dormir. Le poids de la décision d’Eliott de chercher de l’aide, de franchir enfin ce premier pas vers la liberté, était à la fois une libération et un fardeau. Chaque réflexion sur ce qu’il devait faire, sur la manière dont il pourrait protéger Eliott, le laissait avec un goût amer d’incertitude. Mais il n’était plus question de reculer. Il fallait agir.

Le lundi matin était aussi celui où Eliott semblait le plus fermé. Paul remarqua rapidement que son ami était plus nerveux que d’habitude, les yeux fuyants, presque comme s’il avait peur d'être vu. Ses gestes étaient plus rapides, moins naturels. Il avait l’air d’un jeune homme qu’on poussait vers un changement qui lui faisait peur, mais en même temps, il savait qu’il n’avait plus le choix.

Eliott arriva au café comme à l’accoutumée, les cheveux en désordre, cachés sous une casquette qu’il enfonça un peu plus sur son crâne en voyant Paul. Ses yeux bleus clairs étaient comme un miroir de l’hésitation qui l’habitait. Paul savait que quelque chose n’allait pas, mais il n’osait pas encore aborder le sujet.

Il attendit patiemment, observant Eliott qui préparait les boissons pour les clients, tout en se concentrant sur ses gestes comme s’ils étaient la seule chose qui le maintenait ancré à la réalité. Lorsqu’il s’approcha enfin de la table de Paul, il semblait plus nerveux que jamais.

- Tu veux un café ? Demanda Eliott d’une voix presque trop basse, comme s’il cherchait à se cacher derrière une routine familière. Mais ses yeux trahissaient une angoisse qu’il ne pouvait dissimuler.

- Oui, merci. Paul sourit, mais il sentit une tension dans l’air, une douleur presque palpable. Tu sais, on peut… commencer à prendre des mesures, si tu es prêt.

Eliott regarda Paul, son regard fuyant, ses lèvres serrées comme s’il avait du mal à articuler les mots.

- Je… je suis prêt, répondit-il enfin, sa voix plus faible que d’habitude. Mais j’ai peur, Paul. Et je sais que ça va être difficile. Est-ce que je vais… être vraiment en sécurité ?

Paul posa sa main sur celle d’Eliott, un geste simple mais chargé de tout son soutien.

- Tu le seras. Je te promets que tu le seras. C’est pour ça qu’on doit faire ça, ensemble.

Le regard d'Eliott se fit plus doux, et Paul put voir un éclat de gratitude, bien qu’il y ait encore de la peur dans ses yeux.

- Et si… et si je ne m’en sors pas ?

- Tu vas t’en sortir. Parce que tu n’es pas seul. Pas cette fois.

Ils restèrent là quelques instants, dans ce silence lourd mais apaisé, jusqu’à ce qu’Eliott hoche lentement la tête, comme pour accepter le défi qui l’attendait.

- D’accord. Faisons-le.

Le lendemain, le téléphone d’Eliott vibra dans sa poche alors qu’il travaillait derrière le comptoir. Paul lui avait donné l’information cruciale qu’il lui avait parler : le numéro de l’organisme de protection de l’enfance, un premier qui pourrait peut-être les guider dans leur quête de sécurité.

Paul n’avait pas cessé de réfléchir à la manière dont il allait tout organiser. Mais en voyant Eliott là, avec son regard décidé, il avait l’impression que, même s’il y avait encore des obstacles à franchir, le plus grand pas avait été fait. Eliott était enfin prêt à chercher de l’aide, à sortir de l’ombre de son oncle.

La journée a lentement, chaque minute étant un rappel constant de l’inquiétude qui pesait sur eux. En rentrant chez lui ce soir-là, Paul envoya un message à Eliott. Le texte était simple, direct : "On en parle demain, ok ?"

Quelques heures plus tard, la réponse arriva : "Je pense que je suis prêt. J’ai appelé. Demain, je vais rencontrer quelqu’un."

Le cœur de Paul se serra de soulagement. Mais dans le même temps, une nouvelle vague de questions le submergea. Qu’allaient-ils faire si l’oncle d’Eliott venait à se venger ? Et si le processus de protection était plus long qu’ils ne l’avaient anticipé ?

Le lendemain matin, Paul retrouva Eliott au café, mais ce matin-là, il y avait une sorte de calme étrange entre eux. Eliott était plus concentré que d’habitude, son visage plus détendu, bien qu’il semble encore sur le qui-vive. Il était nerveux, mais pas aussi effrayé qu’avant. Paul remarqua un petit sourire à peine perceptible sur ses lèvres.

- Tu… tu vas bien ? Demanda Paul, cherchant à briser la glace tout en sachant que la situation restait fragile.

- Je crois. Eliott hocha la tête. J’ai parlé à un conseiller. Il m’a écouté et il a dit qu’on allait faire en sorte que je sois en sécurité. C’est… bizarre de ne pas avoir à cacher tout ça. Mais c’est aussi effrayant.

Paul se pencha un peu plus près de lui, un regard plein de sincérité dans les yeux.

- Tu es courageux, Eliott. Peu de gens auraient pu faire ce que tu viens de faire. C’est la première étape. Et je serai là pour chaque étape suivante.

Les paroles de Paul étaient comme une promesse silencieuse, mais une promesse qu’il comptait bien tenir, quoi qu’il en coûte.

Les jours suivants èrent à une vitesse étrange, comme si chaque moment était à la fois une victoire et un défi. Eliott continua de travailler au café, mais son regard avait changé. Il y avait maintenant une étincelle d’espoir, une lueur fragile qui, petit à petit, prenait forme.

Le chemin pour trouver une solution était encore long. Mais pour la première fois depuis longtemps, Eliott n’avait plus l’impression de se battre tout seul. Il avait un allié en la personne de Paul, et cela suffisait, du moins pour l'instant.

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Neko__satoru